Thursday, January 10, 2002 to Saturday, February 23, 2002

    Opening
    • Friday, January 11, 2002
    On ressent tous une sensation de confort quand on est bien installé chez soi, que ce soit dans un appartement, un loft, une maison ou un duplex. Et pourtant, on continue de rêver rénovations, sous-sols finis, placards spacieux et jardins. Des périodiques populaires tels House and Home ou Wallpaper influent sur nos besoins matériels et nous aident à combler ces rêves en nous permettant de goûter à ce que lon peut ressentir à lintérieur dune demeure branchée et superchic. This Old House, et autres émissions télévisées nous enseignent la base dun savoir autodidacte (How-to) pour réaliser un style feng shui, rustique ou minimaliste quon finit par croire essentiel à notre existence. Pour une certaine somme dargent, IKEA nous rapproche encore un peu plus de la possibilité de vivre notre fantaisie. Mais en réalité, ce nest pas vraiment à la surface que se trouve la maison. Nos fondations, quelles soient ou non faites de béton, ne sont pas les structures sur lesquelles on bâtit lessence de la « maison ». Ce sont nos traditions, notre culture et nos histoires de famille qui créent le cadre nous permettant de transformer une maison en demeure. Le logement peut également être représentatif de la culture et du statut social. Les ghettos et « les projets » remplis de familles engendrent la peur dans les esprits. Les réserves indiennes, occupées par plusieurs générations des mêmes familles, jettent aussi la peur et la jalousie dans les têtes. Le cadre pour établir ces structures dordre social a été bâti sur le pouvoir. Le pouvoir de contrôler où pouvaient vivre les indésirables, les pauvres, les démunis, les minorités et « autres » races. Le gouvernement a offert de financer des logements dans les réserves indiennes (pas toutes les réserves) mais cette offre ne permet pas à un individu de se bâtir une maison de rêve ou de bâtir une maison pouvant accommoder sept enfants, des grands-parents et des parents. Les programmes de logement des Premières Nations offre des maisons modèle de base avec un toit, une fondation, de lisolation thermique, un cabinet de toilette et de lélectricité. Et pourtant, on estime que la moitié des logements des Amérindiens à lextérieur des grands centres urbains nont pas ce quil faut en terme disolation thermique, de plomberie et délectricité. Le financement et le nombre de maisons construites par année sont limités, tout comme les logements à prix modique dans les villes et banlieues. Dans son œuvre "Small Villages", Frank Shebageget se penche sur les concepts de communauté, de maison et de planification urbaine/rurale. Son travail aborde la question du développement de logement dans les réserves et nous permet de visiter une communauté construite sur des concepts occidentaux et modelée pour accommoder une « famille nucléaire typique ». Est-ce un modèle indien? Est-ce un modèle isolé? Ce sont des questions que lon pose. Comme on sait que Shebageget est Anishnabe, nous prenons pour acquis que ces maisons ont été financées par le gouvernement. Quoiquil en soit, ce village est un modèle générique dune communauté. Cest peut-être sa demeure et son voisinage, ou cest peut-être les vôtres. Dans le plan détaillé des villages de banlieue ou des nouveaux projets de développement, nous remarquons que la duplication privilégie le confort, lidentité corporative et légalité au détriment de la diversité. Lintention derrière de tels designs architecturaux, cest de nous éviter le souci dimiter les Tremblay et les Desjardins, puisquils vivent probablement dans une maison presquidentique à la nôtre. Les seules différences saffichent par le statut social et largent. Dans "Indian Housing", Shebageget vante la diversité et lingéniosité quon trouve dans larchitecture indienne. Son étude de treize types de logements indigènes renvoie au vieux cliché : on est chez soi là où le cœur se trouve. Oui, ce sont bien les origines et la culture qui comptent. Les demeures étaient belles, avec des structures multi-fonction qui non seulement sadaptaient bien à lenvironnement mais aussi aux nécessités de diverses sociétés. Certains logements étaient rabattables et portatifs, permettant à leurs propriétaires de se déplacer dun endroit à lautre alors que dautres, bâtis solides et dune grande durabilité, étaient qualifiés de château par de nouveaux arrivants. Peu importent les matériaux et fondations utilisés pour construire ces habitations, leur force tenait aux individus qui les habitaient. Le peuple Haudenosaunee estime que les éléments de la nature sont leurs matériaux de construction: le sol est le plancher, lEst est la porte de lEst, lOuest est la porte de lOuest et le ciel est le plafond. Il faut que chacun se souvienne quon est toujours dans la maison du Créateur. Le choix de matériau de Shebageget pour cette installation, soit le papier noir goudronné, renvoie à la pauvreté mais souligne également la nécessité commune appliquée aux couches de matériaux de construction quon trouve dans la constitution de nos maisons modernes. Les poutres retiennent le papier comme un retable, rendant hommage au passé et lévoquant. Les mots gravés en relief représentent faiblement les treize habitations jadis si communes et abondantes, alors que les plans détaillés illustrent les attributs coloniaux de ce quon identifie maintenant à titre de maison moderne « indienne ». Dans nos maisons, les éléments de structure comme les murs, les toits et les planchers servent dabri, alors que les éléments naturels quon manipule fournissent chaleur, électricité et nourriture. Cela mis à part, lœuvre de Shebageget évoque limportance de la communauté comme structure. Éloignée ou urbaine, la communauté façonne lessence même des personnes. Un cliché noir et blanc de la maison de son père renvoie Shebageget à son lieu dorigine. Quil demeure attaché à cette maison ou non, il verra toujours en elle sa demeure. La demeure est un endroit, un territoire aussi bien quun paysage, cest la réponse à la question: doù viens-tu? Ces endroits quon qualifie de demeure appartiennent à nos parents, grands-parents, amis, amants ou amantes, et nations. Ils sont situés en milieu urbain ou rural ou en des espaces isolés. Ils recèlent de bons et de mauvais souvenirs, de bonnes odeurs, et laissent entendre de bruyants craquements. Ils fournissent abri, amour, lumière et rires. Que les demeures que lon choisit de bâtir gardent leur aspect de papier goudronné ou quon leur donne une finition en pierres, leur valeur et leur importance se mesurent à lesprit et aux sentiments quon trouve dans leur intimité. Venez à lintérieur entendre les histoires que les murs ont à raconter. Ryan Rice