En tant qu’oratrice, María Lezón est capable de sortir en une seule phrase les mots « passion, chorizo, lolita, chaleur et cellulite » tout en restant susceptible de toujours comprendre une expérience qui est particulièrement féminine. En tant qu’artiste, elle arrive à appliquer la même façon de penser pour créer des peintures complexes et difficiles, à plusieurs couches; elle rend plus complexe la représentation de la femme dans l’art et élargit la tradition en peinture.
« Papier peint » (Wallpaper), la plus récente collection d’œuvres de la peintre prolifique, María Lezón, témoigne de la continuité et de la pertinence de la peinture malgré les critiques reçues du conceptualisme. Le travail de Lezón tente de rendre les jonctions et les possibilités inhérentes à la métaphore et au symbolisme. Selon la description qu’elle en fait, cette expression est le reflet d’une connexion globale qui attire l’attention sur un état d’absurdité reflétant des options et appropriations infinies. À cet égard, la pratique de la peinture répond à un désir continu de peindre et, plutôt que d’être présentée comme une pratique redondante empreinte de nostalgie, elle est plutôt considérée comme un moyen d’expression critique pour traduire des expériences contemporaines.
«Papier peint» est la suite de la collection d’œuvres complexes de Lezón, qui explorent la représentation de la femme placée dans des paysages oniriques, portant des costumes splendides, adoptant une attitude sensuelle et stylisée. Ses peintures se rapportent à l’histoire de la peinture en extrayant et créant des images peintes qui font état de l’expérience sociale et qui présentent des événements. À l’intérieur d’un cadre d’hybridité, de postmodernisme, de culture de la marginalité et de féminisme, Lezón crée des paysages contemporains et des personnages féminins solidement mis en évidence à la surface de ses peintures.
Dérivé d’un style baroque, le travail de Lezón présente une nature hybride de postmodernité. Il est imprégné des qualités du baroque par une richesse sensuelle, par le drame, la vitalité, le mouvement, la tension, l’exubérance émotionnelle et l’embrouillement des distinctions entre plusieurs peintures gestuelles.
Lors de récentes communications avec Lezón, celle-ci a mentionné que sa pratique était guidée par une exploration de la représentation de la femme, particulièrement dans le domaine ménager, et par les insinuations continuelles faites aux femmes pour réaliser ces images et ce, même encore aujourd’hui. Son plus récent travail met l’accent sur le pouvoir du récit et de l’interprétation pour instruire nos expériences. Des questions portant sur la création et sur la façon dont les œuvres sont perçues sont mises à l’avant-plan par le biais de compositions et d’appariements complexes. Le fait de reconnaître des endroits et des personnages dans les peintures force le spectateur à questionner l’autorité de l’image, l’intention de l’artiste et, par la suite, la signification de l’œuvre.
Dans la peinture « La Soirée », le poids de l’œuvre est porté par la position des personnages féminins dans le groupe. Dans un style baroque à l’excès, Lezón laisse entendre que le contraste entre la noirceur et la lumière dans cette peinture tire son origine d’un endroit divine; toutefois, dans ce cas, la lumière provient de l’écran de télévision, une fenêtre qu’elle qualifie de portail sur un monde partiel. Bien qu’elle emploie un style dérivé du baroque et du collage, Lezón fait un portrait des femmes qui brave les convenances traditionnelles par lesquelles elles ont été représentées. Par opposition, les images de Lezón ne garantissent pas la stabilité et la prospérité de la société dans son ensemble. Dans les peintures, ces femmes n’inspirent ni doux sentiment maternel ou piété. Au contraire, ces personnages féminins tordus mais crédibles se tiennent debout, sensuels et seuls.
La représentation des femmes dans les peintures de Lezón ne renforce pas les rôles qui leur sont attribués par la société; le symbolisme de l’apparence de la femme conserve une présence supérieure, extrême et belle, intouchable et irréelle. Cependant, le filtrage des nouvelles du jour dans le paysage des peintures met une date et un lieu dans ces endroits composés, ainsi qu’une image de Saddam Hussein, à la télévision ou dans un journal et insérée dans la peinture, ramène notre attention sur notre expérience et notre quotidien.
« Wallpaper » reflète l’abondance d’idées et d’attitudes de Lezón, de ses préoccupations autobiographiques hautement personnelles à l’exploration des sujets sociaux et politiques les plus pertinents, des actions puissantes des histoires et mémoires régionales aux critiques humoristiques et irrévérencieuses sur la culture globale contemporaine. Examinant l’héritage de l’art baroque, l’hybridité de la culture (globale) de la marginalité et de la culture pop, les peintures de Lezón provoquent et enchantent avec leur beauté unique; les femmes ne sont ni idéalisées ni dépréciées, elles existent simplement, maladroitement, dans un monde instable.
--Jessie Lacayo, Commissaire
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Thursday, March 18, 2004 to Saturday, April 24, 2004
Opening- Friday, March 19, 2004
